Après la beauté des îles Baléares, direction Gibraltar au plus vite. Nous traversons jusqu’à Cartagène puis longeons la côte Est de l’Espagne. Nous avalons les miles, les journées de navigations sont longues avec une météo ne nous facilitant pas la vie, et cette côte n’est pas vraiment charmante (de ce qu’on en voit car nous ne rentrons pas du tout dans les terres). Quelques jours de pétole (pas de vent) se dessinent. Comme nous devons quand même avancer, le moteur s’impose. Nous décidons alors de profiter de la mer plate accompagnant la pétole pour faire 2j et 1 nuit au moteur.
Fin de la première journée, on avance bien, c’est parti pour les quarts de nuit.
Dernière partie de la nuit, Jed est de quart, Piline dort. 07h30 j’entends dans mon sommeil le moteur s’arrêter. Je me dis : « Chouette, le vent s’est finalement levé, Jed sort les voiles!! » J’ouvre quand même rapidement les yeux et demande à Jed si tout va bien. Sa réponse « il a calé » me fait sortir du lit d’un bon. Je sens bien qu’on est parti pour une galère!
Le moteur ne redémarre pas. On regarde le préfiltre du gazole – on nous avait dit que c’est souvent la première cause de panne. Il a l’air propre. En revanche il ne baigne pas dans le gazole comme d’habitude. Nous tapons sur les réservoirs, ils sonnent bien creux ! Bon, bah c’est probablement une panne de carburant.
Objectif : se rapprocher de la côte, et si possible d’un port. On sort les voiles qui peinent à se gonfler avec les 2nd de vent. Nous sommes à 9miles des côtes. En soit ce n’est pas loin. En avançant moyennement à 5nd on y serait en à peine 2h. Sauf que nous avançons à 2nd, parfois un pic à 3nd pour nous donner de l’espoir, et souvent des pointes à …0,00nd ! Mais au moins, pas de courant contre, on ne recule pas !! Aucun bateau sur l’eau pour nous dépanner de quelques litres. Patience patience ! Nous arrivons finalement à atteindre la côte au bout de 7h!! Et chance il y a un port là où le vent a bien voulu nous pousser.
Sauf que sans moteur, nous ne pouvons pas entrer seuls dans le port.
Nous appelons le port à la VHF, personne ne répond ! 😤 Nous les appelons au téléphone : ils n’ont pas de zodiac. Ils nous donnent le numéro de quelqu’un qui pourrait peut-être nous aider. Comme ils ne parlent pas du tout anglais, la compréhension n’est pas toujours facile. On appelle donc cette personne, sans vraiment savoir qui est-ce. « Pepe » peut nous aider, il sera là dans 30min. Avant de conclure je lui demande maladroitement qui il est et si ça nous coûterait. Car on a pas vraiment envie de s’embarquer dans un traquenard nous coûtant les yeux de la tête. Avec l’intonation et un « no pasa nada » je crois comprendre que ça ira. En l’attendant nous posons l’ancre, pour éviter de ne plus maîtriser le bateau et de dériver sur la digue du port! Premier ancrage sous voile (petit challenge car peu de vent mais nouvelle expérience quand même !) Parfaite gestion du capitaine 😍
Pepe arrive, on s’amarre et en avant! Jed reste à la barre, pour accompagner les mouvements du bateau, Piline surveille à l’avant que l’amarre nous tracte correctement sans forcer sur des éléments du bateau.
On entre dans le port. La profondeur diminue à vue d’œil (nous avions quand même bien demandé en amont à Pepe si ça passe avec notre tirant d’eau – il paraîtrait que oui). Plus que 10cm sous la quille, puis 0cm pendant un moment… mais rien de touche ! Arrivés à la station de carburant du port, Pepe anticipe mal l’inertie du bateau. Nous arrivons beaucoup trop vite !! Il gère la manœuvre de rattrapage et nous sommes finalement amarrés au quai sans rien abîmer. 😓
On fait le plein, puis on essaye timidement de rallumer le moteur. Nada, niet, kedal ! Coup de pression intérieur pour chacun. Cela veut dire qu’il y a un autre problème moteur et que nous allons rester bloqués ici… On sort le manuel d’atelier du moteur. Jed identifie assez vite qu’il doit avoir de l’air dans le circuit. On purge le filtre à gazole. Le manuel explique ensuite qu’il faut dévisser les injecteurs (ce qui envoie le gazole haute pression au moteur), faire tourner le démarreur avec beaucoup de gazes jusqu’à ce que ça gicle par chacun des injecteurs, puis les resserrer. On est fatigués, on gêne la majorité de l’espace de la station essence, on appréhende de toucher à ces pièces moteur si essentielles, bref on se passerait bien d’effectuer cette étape. On appelle alors Julien du chanteur CNPF. Il répond tout de suite et comme d’habitude on a pas l’impression de le déranger ! Avec sa voix sereine il nous confirme que cette étape est indispensable pour évacuer la bulle d’air, tout en nous précisant « tu verras ça se fait bien! ». Que c’est bon d’être encouragés ! Jed aux injecteurs, Piline à la commande moteur, on se lance. Puis on essaye de redémarrer… le moteur fonctionne !!!! ÉNORME soulagement ! Il est 16h30, on remplit un bidon de secours (on apprend vite de ses erreurs!! 😏) et on s’empresse de repartir! Que d’émotions!
Fait avec amour par Jed & Piline