23 septembre * J0
Départ vers 16h du port. Le temps est mitigé et Levenez ne tarde pas à être tout mouillé par un bon crachin breton. L’île de Groix dépassée, nous éteignons le moteur et déroulons le génois. Nous avançons à 5,5 noeuds pour 6 noeuds de vent !! 🤩 Mais cela ne dure pas et les vitesses de vent et de Levenez diminuent. Direction le large : plus de côte, moins de bateaux autour, nous nous mettons au chaud dans notre cabane ☺️ Soupe et croques-monsieur au menu pour faire le plein de chaud avant la nuit. C’est évidement au moment de cuisiner que le vent monte sans transition, nous offrant une belle gîte. Cela ne dure que le temps du dîner. 19h30 au dodo pour moi, les quarts commencent. À la prise de mon premier quart le vent forcit, nous réduisons le génois. Au milieu de mon quart le vent forcit encore et le pilote ne tient plus le bateau. Petit coup de stress ! Je sors en trombe et récupère la barre. Je n’arrive pas à savoir si la barre est dure parce qu’elle est en butée (dans ce cas, ne pas forcer!!) ou si c’est l’intensité des vagues qui me résiste (dans ce cas, forcer!!). Après un cafouillage je reprend la maîtrise de Levenez, sous les yeux calmes mais attentifs du capitaine qui est dans la descente. Nous nous écartons du vent et troquons le génois pour la trinquette. On perd 1,5 noeuds de vitesse, mais nous avançons quand même à 7 noeuds !! La mer est mauvaise, ce n’est pas très agréable. Le quart suivant commence dans une zone de pêche. Nous passons entre des bateaux de pêche qui n’apparaissent pas à l’AIS. Il faut rester attentifs. Difficile de savoir s’ils dérivent ou s’ils avancent.
24 septembre * J1
Le jour se lève. La mer est toujours désordonnée. Le vent est instable. La position horizontale étant la seule tolérée, nous nous relayons entre le lit et le canapé durant toute la journée. Mer malmenante : 1 / courage de Piline : 0. Les « repas » se résument à grignoter de temps en temps des amandes, rillettes, fromage, curly, bananes, … Le vent forcit encore dans la nuit et nous devons affaler la GV. Je n’aime pas faire ça de nuit – d’autant moins quand on se fait secouer comme maintenant – car Jed monte 1 marche au mât pour ranger la voile. S’il ne se tient pas bien, les mouvements du bateau auront vite fait de l’envoyer par dessus bord. On enfile les gilets et on se lance. Un grain nous menace mais nous l’évitons finalement. Voilà, la GV est affalée. La nuit n’est pas reposante.
25 septembre * J2
L’amarinage n’est toujours pas acquis avec cette mer qui nous bouscule de côté jours et nuits. Le vent continue de nous faire jongler avec les ris du génois. Le relais canapé-lit est toujours d’actualité !! Et puis nos esprits sont peut-être moins détendus que d’habitude. Les orques sont bien présents dans nos têtes. Cela fait 2 ans qu’elles attaquent les voiliers, principalement entre Gibraltar et la Corogne. Ceux qui ont cette malchance se retrouvent sans safran, celui-ci étant déchiqueté par les orques. Encore la veille de notre départ il y a eu une attaque vers Nazaré. C’est la raison pour laquelle nous avons décidé de ne pas faire d’escale le long de la côte Portugaise, qui est pourtant si belle paraît-il. Nous avons fait le choix de rester loin des côtes, et des tombants (zones de chasse des poissons où les fonds remontent entre le large et les côtes). Espérons que ça paye car d’une part, on aurait bien envie de s’arrêter, et d’autre part si nous subissons une attaque nous serons plus loin de l’assistance des côtes.
Finalement l’amarinage semble se faire. Nous sommes davantage vent arrière, ce qui rend la mer moins désagréable. Nous prenons de « vrais » repas (conserves et plats lyophilisés, mais c’est déjà ça !!), ça fait du bien.
Ça y est le golf de Gascogne est derrière nous, une bonne étape de faite !
La nuit est plus reposante : pas de manœuvre de voiles, moins de cargos, nous dormons bien pendant nos quarts de dodo et arrivons à faire des micro siestes pendant nos quarts.
26 septembre * J3
L’amarinage des corps est fait, mais les vagues nous bousculent toujours fort ! La vie à bord est compliquée. Tobago est vraiment gentils, il ne dit rien malgré quelques regards interrogateurs ! Le soleil est là, c’est un bon réconfort même si nous sommes très peu dehors. Autre élément réconfortant : les miles défilent (plus de 6 noeuds de moyenne chaque jour). D’habitude on ne compte pas trop les miles, mais cette fois, chaque mile parcouru est un mile de moins avec les orques !
27 septembre * J4
Aujourd’hui la vie reprend à bord de Levenez !! La nuit fût bonne (la fatigue a probablement pris le dessus sur les vagues), la mer se calme, le soleil chauffe 👌🤩 À midi on laisse les conserves de côté pour savourer de bonnes galettes ! Tout un challenge cependant car il y a beaucoup d’ingrédients sortis en même temps et les mouvements du bateau rendent la tâche périlleuse ! Pour agrémenter ce grand moment : nous déjeunons dehors !!! 🥳 Que c’est bon !! Les températures se réchauffent, on a bien quittés la Bretagne ! 😉 2 invités surprise ont voulu fêter ce renouveau avec nous 🦑😄
Cette trêve a fait du bien, malheureusement elle est de courte durée. Cette nuit c’est nuit blanche… mer : 1 / dodo : 0 ! Le vent est remonté, et avec lui, les vagues se sont creusées. Nos corps se font projeter de droite à gauche dans le lit, aucune position n’arrive à nous caler. Pour ajouter un peu de plaisir, j’ai la chance de me faire tremper, du bonnet au pantoufles, par une déferlante lors de mon 1er quart ! 💦
28 septembre * J5
En me recouchant ce matin j’arrive à m’assoupir quelques minutes. Des vagues plus fortes me réveillent. Je cherche Jed du regard. Je me lève : je ne le vois toujours pas, ni dans le carré ni dans le cockpit. En 1/4 de seconde mon cœur s’emballe. 😳 Jusqu’à ce que je fasse 3 pas et le trouve aux toilettes. Quel violent réveil !
A midi nous nous rapprochons du vent et enlevons le tangon. L’allure bouscule un peu moins, même si on ne peut pas encore appeler ça du confort ! Pendant le déjeuner, une vague plus grosse bouscule violemment Levenez par le flanc. Nos fesses se soulèvent mais se rassoient aussi vite grâce à la table qui nous a retenus. Tobago, lui, sagement allongé sur la partie gauche du canapé, se fait catapulter contre les placards de l’évier..! Pauvre toutou, pas facile facile d’être un mousse en ce moment !!
Changement de plan pour la route, nous décidons de couper un peu la trajectoire prévue et de passer la pointe sud du Portugal moins au large. Espérons que les orques n’y soient pas.
Début de nuit : la pointe est passée et le calme s’installe. Je suis couchée, un bruit résonne dans la cabine. C’est une bouée de pêche qui roule le long de la coque de Levenez…! On a eu chaud qu’elle ne se prenne pas dans le safran ! Elle doit être à la dérive car il y a trop de profondeur à cet endroit pour que nous soyons dans une zone de pêche. La mer se calme, le vent aussi, Levenez avance bien. Cela fait beaucoup de bien !! Nous dormons comme des bébés !!! 👌
29 septembre * J6
La journée commence bien : grand soleil, petit vent, petites vagues, bonne vitesse !! Cela fait beaucoup de bien aux corps et aux cœurs ! La vie à bord est plus facile et toute joyeuse !! Une partie de l’après-midi se passe dans le cockpit : discussions, rires, musiques, danse, … le pied !!! 😍 Pendant que je pèle les patates pour une purée, Jed passe un petit moment à l’avant avec des dauphins ! ✨
Début des quarts, nous ne sommes plus très loin du détroit de Gibraltar ! Nous allons le passer à nouveau, deux ans après, ça fait drôle !
30 septembre * J7
07h : ça y est le détroit est passé, courant avec nous !! 👌 Nous nous avançons doucement dans la nuit entre les cargos à l’arrêt. Le capitaine me renvoie à l’intérieur, ma vision nocturne avec les lumières étant inefficaces. Je m’attelle alors à un peu de gourmandises ! Thé et crêpes chaudes au chocolat !! 😋
Ça y est, 10’ avant l’ouverture de la capitainerie et au levé du jour nous voilà arrivés !!! Une belle étape de faite !! 2 ans et 2 jours après notre 1er passage qui marquait le début d’une sacrée aventure, nous retrouvons ce rocher mythique, la Méditerranée, et le soleil !! En nous reconnectant nous prenons conscience de la chance qu’on a eu, même si ce n’était pas la navigation la plus confortable. Pouvoir avancer à la voile jusqu’au bout, y compris après la pointe St Vincent où il y a généralement du vent contre. Et aucune interactions avec les orques alors que qu’il y en a eu 2 recensées exactement là où nous sommes passés ! ✨
Fait avec amour par Jed & Piline